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Publié par René Mettey

Jacques  Van Rillaer. "Freud, Lacan, des charlatans ?" Faits et légendes de la psychanalyse.

Cet ouvrage édité en 2019 par Mardaga, Bruxelles, a un immense mérite : il est écrit par un professeur de psychologie à Louvain et Bruxelles, et qui a pratiqué avec "conviction"  la psychanalyse pendant dix ans : quelle meilleure référence pour enterrer cette imposture qu'un professionnel de cette théorie, adoubé par ses pairs universitaires ? 

Michel Onfray s'y est essayé en 2020 ("Crépuscule d'une idole"), et a essuyé une multitude d'attaques dont certaines injurieuses (dont évidemment la classique et sempiternelle accusation d'antisémitisme -car il faut s'ébaubir devant Freud, Einstein, voire Benvéniste, sinon gare à l'anathème-) mais Onfray n'étant ni psychologue, ni psychanalyste, son étude, à la limite du pamphlet parfois, pouvait paraître superficielle.

Mais ici, c'est un "poids lourd" de la psychologie qui s'exprime, et un psychanalyste repenti.

En résumé : bien sûr, Freud, Lacan, Dolto, c'est de la pure bouffonnerie. Et, pour ma part, pour Bettelheim, de la bouffonerie criminelle, avec son accusation contre les parents, "responsables de l'autisme" de leur enfant, comme le professent encore d'innombrables psychiatres français.

Van Riller démontre avec brio, et c'est le mérite principal de cet ouvrage, que Freud n'a en rien été un scientifique. Un scientifique constate des faits, en ébauche une interprétation, en vérifie l'application et, seulement si ces applications se vérifient, en élabore une théorie qu'il soumet encore à la vérification. Et cette théorie peut, et doit, toujours être confrontées aux faits et réajustée.

Or Freud a fait exactemnt l'inverse : à partir d'exposés de ses premiers patients, il élabore d'entrée une théorie qu'il ne remettra jamais en cause. Son argument, simple, et simpliste, contre tout constat déviant de la théorie originelle est "le déni".

"Je dis que toutes vos névroses viennent que vous êtes un homosexuel refoulé. Vous l'admettez ? Alors j'ai raison ! Vous ne l'admettez pas ? Alors vous déniez et j'ai raison !"

Cette façon de raisonner est exactement celle de la pensée primitive, qui a sévit jusqu'à la renaissance voire au XIXème siècle ! On crée une théorie arbitraire, et on fait entrer les faits dedans, par n'importe quelle explication. 

Sa théorie primitive relève toujours et entièrement une origine sexuelle à toutes nos pensées, toutes nos actions, qu'elles soient positives ou pathologiques.

D'autres présupposés ont été élaborés par d'autres auteurs, et Van Rillaer précise bien "le freudisme n'est qu'une des innombrables formes d'analyse psychologique". p.37

Si l'obession sexuelle exclusive de Freud  si peu mise en évidence -ce qui d'emblée aurait dû disqualifier la psychanalyse- c'est que d'emblée il eut de nombreux disciples dissidents (Adler, Jung, Rank...) qui, dans l'esprit des lecteurs, ont atténué cette direction morbide. Disciples que, bien entendu, Freud a excommunié avec vindicte dès les premières remarques -en les "psychiatrisant" dit Van Rillaer-. (cf p.83)

Ce type de réponse aux objections, rendant irréfutable une théorie, et l'excluant par là-même du domaine de la science, aurait donné l'idée à Carl Popper de son précepte de réfutabilité en étudiant les théories psychanalytiques ! (cf p.92)

Van Rillaer liquide au passage le problème de l'analyse didactique. On ne peut être estampillé psychanalyste que si on a soi-même subi une psychanalyse ("didactique"). L'auto-analyse ne peut exister. On découvre tant de faits douloureux dans une analyse que l'on ne peut les extirper de son inconscient. Certes, c'est logique. Mais alors Freud, par qui a-t-il été analysé ? Certes encore, disent ses thuriféraires, Freud fut un tel génie qu'il n'avait pas besoin d'analyse, s'étant analysé lui-même ! Et Freud l'a affirmé. Or l'auteur montre, dans les courriers exhumés de Freud, qu'il a menti et ne s'est jamais analysé ! 

Pour moi, ceci fait s'effondrer toute la psychanalyse. 

De ce maître contestable, mais incontestable pour ses affidés -et Onfray en a subi les foudres- on a vu une Françoise Dolto en dériver des abstractions délirantes. On lira avec amusement des exemples (par exemple, quand un garçon tête sa mère, il accomplit le complexe d'Oedipe et le complexe de castration en s'imaginant avaler le lait de sa mère, puis tout l'intérieur de son corps dans lequel se trouve le pénis de son père !

Quant à Lacan, l'auteur en est à se demander, tellement les phrases et discours de Lacan sont incompréhensibles, si le maître ne tentait pas de voir jusqu'où il pouvait s'avancer dans le délire sans dégouter ses disciples ! 

Pour ma part, il me semble me souvenir que Lacan avait envoyé sa thèse à Heidegger, et que celui-ci aurait estimé "que le psychiatre aurait besoin d'un psychiatre"...

Conclusion et conseil de lecture : Ouvrage raffraichissant et, nonobstant le ton les références sérieuses de l'auteur,  jubilatoire ! À lire sans retenue par ceux qui sont persuadés de l'imposture de la psychanalyse, ceux qui doutent encore mais veulent en être confortés, ceux qui y croient encore mais qui entendent une petite musique d'incrédulité raisonner dans leur sub-in-conscient.

 

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