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Publié par René Mettey

Critiques, chroniques littéraires 3 Le Saint-Suaire de Turin. -témoin de la passion de Jésus-Christ-. Jean-Christophe Petitfils. .- Freud et Lacan : des charlatans ? J. Van Rillaer.- Le retour de l'hypothèse DIEU. Stephen Meyer. Festival de Bayreuth. Jacques Peter.

Ce livre porte en bandeau : "L'enquête définitive". Effectivement, sans que cette enquête soit la dernière qui paraîtra (the last but not the latest), il s'agit là d'une synthèse capitale sur ce sujet si délicat et explosif du linceul conservé à Turin. Il y aura certes quelques études complémentaires, mais elle porteront sur des acquits scientifiques, archéologiques ou historiques supplémentaires mais ponctuels. Même si des milliers d'ouvrages et d'articles ont été écrits, cet artefact archéologique, comme disent les anglosaxons, livrera encore des données surprenantes.

Le premier et capital intérêt de ce livre est de commecer par une importate reconstitution du cheminement de ce linceul, depuis Jérusalem, Edesse, Constantinople, jusqu'à Lirey. ll ne s'agit pas de suggestions, de propositions, mais d'une étude s'appuyant sur des documents et des enquêtes réelles et nombreuses. Le lecteur est d'ailleurs stupéfait tout au long de l'étude par l'importance des références et de la bibliographie, témoignant de la profonde éruditoin et du profond sérieux de l'auteur. Rien que pour cet aspect, la lecture de cet ouvrage doit être recommandée.

Nous laissons le lecteur découvrir l'originalité de la reconstitution de ce cheminemnt, qui anihile bien des légendes (dont celle du roi Abgar d'Edesse) et des idées reçues. Ainsi, la "tête" qu'auraient contemplé bien des personnages historiques -et les templiers !-, ne serait pas le sindon replié pour ne montrer qu'elle, mais un autre linge, le mandilion.

L'autre originalité est de suivre aussi la destinée de cet autre artefact, confondu souvent avec le "Saint Suaire" (en fait, un linceul, le "sindon") : le mandilion, lui un véritable suaire -id est, pour recueillir la sueur, ou les sécrétions- , de petite taille, ayant recouvert le visage de Jésus au tombeau, portant lui aussi l'image probable du visage du Christ.

NB : ce mandilion, "suaire", est distinct du suaire d'Oviedo, linge qui aurait recouvert le visage de Jésus lors de la descente de la croix. Ce suaire d'Oviedo ne comporte aucune image du visage, mais les traces sanglantes émises par les blessures du supplicié.  et de sérosités, celles-ci issues des narines, 

Cette étude historique constitue près de la moitié du livre (195 pages sur les 413 du texte !) et aurait pu faire l'objet d'une publication à part entière.

Mais la seconde partie est tout aussi capitale et démonstrative, tout aussi argumentée et documentée (je le répète, on s'émerveille du travail de l'auteur).

Mais, là encore, cet ouvrage est original -et pourtant ai-je lu une cinquantaine de titres sur le sujet, des dizaines d'articles, et ai contemplé le "Saint Suaire" à Turin lors de sa dernière ostention- en ce qu'il décrit un va-et-vient : la Science étudie et démontre la réalité de cette icone, mais cette icone précise des faits inconnus ou mal connus de l'Histoire ! Par exemple la coulée des traces de sang sur les avant-bras, dans deux directions différentes, décrivent exactement la descente de la croix ! (les soldats déclouent les pieds sur le petit reposoir, descendent le corps avec le patibulum puis, le corps étalés sur le sol, déclouent les bras).

Alors que les textes antiques ne précisent pas le détail de la crucifiction, et qui devait s'appliquer de manière différente suivant les lieux et les époques, l'étude de l'anatomie du supplicié du  linceul montre que Jésus a bien porté, non une croix complète, mais le patibulum (la poutre transverse de la croix) jusqu'au poteau vertical solidement implanté pour servir plusieurs fois.

De même les empreintes de sang et de sérosité expliquent que lorsque le légionnaire a piqué le thorax, "de l'eau puis du sang" s'écoulèrent. On interprêtait cette constatation par un témoin présent (l'évangéliste Jean) comme un rajout de symbolique théologique : l'eau du baptême précédant le sang du sacrifice. Or le linceul n'a pas absorbé que du sang, mais aussi des sérosités ! Celles du liquide de l'épanchement péricardique (dans mon ouvrage "L'essence du christianisme" j'évoque un épanchement pleural) dû aux supplices endurés et à l'asphyxie de la crucifiction. L'étude scientifique du linceul certifie les écrits évangéliques et rectifient l'interprétation théologique !

Commenter par le détail les exposés des études sicnetifiques prendrait autant de place ici qu'un autre livre ! Donc, lisez-le ! Je relèverais deux aspects :

-l'auteur fait litière, de manière amusante, de la datation au carbone 14, les choux gras des sceptiques. Cette datation révèle de plus la malhonnêteté des équipes qui ont procédé. À preuve  : ces trois laboratoires -soigneusement sélectionnés par leur incrédulité, sur 7 candidats !- n'ont en rien respecté le protocole mis au point, en particulier en ne respectant pas la procédure du double-aveugle, et se communiquant les résultats au fur et à mesure, alors qu'ils ne le devaient pas. Ils ont toujours refusé de publier les données brutes des mesures, déposées au British Museum. Ils n'ont donné que leur interprétation des résultats de base. Il a fallu que des scientifiques exigent du British Museum ce dévoilement, des années plus tard -mais le mal était fait !-, se fondant sur un décrêt de déclasssification du gouvernement britannique, pour les avoir. Et là, stupeur ! Les résultats bruts avaient une large marge d'erreur. Pire, un des laboratoires avait une plage en dehors des deux autres plages (son maximum était inférieur aux minima des deux autres). Mais qu'importe, "on a fait une moyenne", en contradiction avec toute rigueur scientifique. Un laboratoire avait un minimum bien au-dessus du début de l'exposition à Lirey ! Comme le note M. Petitfils "le lin du linceul n'avait pas encore poussé que le suaire était déjà exposé à Lirey". Finalement, les auteurs des travaux ont avoué piteusement que cette datation était entachée de bien des approximations. Je m'étonne d'une chose : de la naïveté des autorités ecclésistiques qui se sont fait "balader". Ou alors serais-je complotiste en évoquant une complicité ?  Toujours est-il que le pape Jean-Paul II, confirmé par François, ont dégradé ce linceul de relique (id est :  authentique) en icone (id est : image fabriquée, même si personne ne peut expliquée comment elle le fut).

-l'étude des polens, la première démarche scientifique en date et déjà la plus probante, a été critiquée dès ses débuts, mais voilà que les techniques les plus récentes la revigorent : on a trouvé sur les endroits où se sont imprimés les pieds (ces pieds qui ont foulé le chemin vers la croix) des polens d'arbustes restreints à Jérusalem ou environnement proche. Vraiment ce linceul continuera à donner des informations toujours plus fortes.

Un long développement est consacré à la manière dont cette image a pu être crée par radiation.

L'auteur enfin étend le champ de son étude à deux autres reliques : le suaire d'Oviedo et la "Sainte tunique d'Argenteuil" (que j'ai aussi contemplée lors de sa dernière ostension). Étude tout aussi passionante.

Quelques critiques mineures  : si l'auteur est historien, il n'est pas de formation scientifique, et il aurait dû faire effectuer des lectures et relectures sur sa seconde partie Il ya quelques erreurs mineures, que le lecteur rectifie de lui-même mais qui prêtent à sourire.

Par ailleurs, l'auteur a choisi d'affirmer sa foi catholique, à plusieurs reprises. c'est son droit, c'est honnête, c'est son choix, mais cela va lui attirer inexorablement des critiques acerbes et dénégations des incroyants de principe. Mais de toute façon, on ne peut convertir un obtus haineux en "honnête homme" ouvert à toute découverte.

Et pour ma part ? Appartenant au courant du protestantisme libéral, et écrivant en philosophe des sciences,  je tente en permanence de ne jamais me laisser entraîner à des pétitions de principe. Néammoins, en rationaliste, je trancherais pour l'autenticité de cet artéfact comme réalisé, par un phénomène encore inexpliqué, au premier siècle de notre ère, à 99 %, et comme ayant bien enveloppé le rabi Ieshoua bar Yosef à 99 %. (on me ferra un calcul de probabilité sur le fait qu'un autre supplicié ait subit exactement les mêmes tortures que ce dernier pour me persuader du contraire !).

Conseils de lecture : 

À lire, absolument, par tout "honnête homme" de culture, par tout amateur éclairé et curieux de ce linceul de Turin, par tout professionnel concerné par une des disciplines impliquée,  par tout croyant de toute confession, par tout incroyant éclairé (les autres, peut-être pourraient-ils y trouver une illumination ?), comme la dernière analyse objective -nonobstant la foi affirmée de l'auteur- et  encyclopédique sur ce sujet.

Critiques, chroniques littéraires 3 Le Saint-Suaire de Turin. -témoin de la passion de Jésus-Christ-. Jean-Christophe Petitfils. .- Freud et Lacan : des charlatans ? J. Van Rillaer.- Le retour de l'hypothèse DIEU. Stephen Meyer. Festival de Bayreuth. Jacques Peter.

Cet ouvrage édité en 2019 par Mardaga, Bruxelles, a un immense mérite : il est écrit par un professeur de psychologie à Louvain et Bruxelles, et qui a pratiqué avec "conviction"  la psychanalyse pendant dix ans : quelle meilleure référence pour enterrer cette imposture qu'un professionnel de cette théorie, adoubé par ses pairs universitaires ? 

Michel Onfray s'y est essayé en 2020 ("Crépuscule d'une idole"), et a essuyé une multitude d'attaques dont certaines injurieuses (dont évidemment la classique et sempiternelle accusation d'antisémitisme -car il faut s'ébaubir devant Freud, Einstein, voire Benvéniste, sinon gare à l'anathème-) mais Onfray n'étant ni psychologue, ni psychanalyste, son étude, à la limite du pamphlet parfois, pouvait paraître superficielle.

Mais ici, c'est un "poids lourd" de la psychologie qui s'exprime, et un psychanalyste repenti.

En résumé : bien sûr, Freud, Lacan, Dolto, c'est de la pure bouffonnerie. Et, pour ma part, pour Bettelheim, de la bouffonerie criminelle, avec son accusation contre les parents, "responsables de l'autisme" de leur enfant, comme le professent encore d'innombrables psychiatres français.

Van Riller démontre avec brio, et c'est le mérite principal de cet ouvrage, que Freud n'a en rien été un scientifique. Un scientifique constate des faits, en ébauche une interprétation, en vérifie l'application et, seulement si ces applications se vérifient, en élabore une théorie qu'il soumet encore à la vérification. Et cette théorie peut, et doit, toujours être confrontées aux faits et réajustée.

Or Freud a fait exactemnt l'inverse : à partir d'exposés de ses premiers patients, il élabore d'entrée une théorie qu'il ne remettra jamais en cause. Son argument, simple, et simpliste, contre tout constat déviant de la théorie originelle est "le déni".

"Je dis que toutes vos névroses viennent que vous êtes un homosexuel refoulé. Vous l'admettez ? Alors j'ai raison ! Vous ne l'admettez pas ? Alors vous déniez et j'ai raison !"

Cette façon de raisonner est exactement celle de la pensée primitive, qui a sévit jusqu'à la renaissance voire au XIXème siècle ! On crée une théorie arbitraire, et on fait entrer les faits dedans, par n'importe quelle explication. 

Sa théorie primitive relève toujours et entièrement une origine sexuelle à toutes nos pensées, toutes nos actions, qu'elles soient positives ou pathologiques.

D'autres présupposés ont été élaborés par d'autres auteurs, et Van Rillaer précise bien "le freudisme n'est qu'une des innombrables formes d'analyse psychologique". p.37

Si l'obession sexuelle exclusive de Freud  si peu mise en évidence -ce qui d'emblée aurait dû disqualifier la psychanalyse- c'est que d'emblée il eut de nombreux disciples dissidents (Adler, Jung, Rank...) qui, dans l'esprit des lecteurs, ont atténué cette direction morbide. Disciples que, bien entendu, Freud a excommunié avec vindicte dès les premières remarques -en les "psychiatrisant" dit Van Rillaer-. (cf p.83)

Ce type de réponse aux objections, rendant irréfutable une théorie, et l'excluant par là-même du domaine de la science, aurait donné l'idée à Carl Popper de son précepte de réfutabilité en étudiant les théories psychanalytiques ! (cf p.92)

Van Rillaer liquide au passage le problème de l'analyse didactique. On ne peut être estampillé psychanalyste que si on a soi-même subi une psychanalyse ("didactique"). L'auto-analyse ne peut exister. On découvre tant de faits douloureux dans une analyse que l'on ne peut les extirper de son inconscient. Certes, c'est logique. Mais alors Freud, par qui a-t-il été analysé ? Certes encore, disent ses thuriféraires, Freud fut un tel génie qu'il n'avait pas besoin d'analyse, s'étant analysé lui-même ! Et Freud l'a affirmé. Or l'auteur montre, dans les courriers exhumés de Freud, qu'il a menti et ne s'est jamais analysé ! 

Pour moi, ceci fait s'effondrer toute la psychanalyse. 

De ce maître contestable, mais incontestable pour ses affidés -et Onfray en a subi les foudres- on a vu une Françoise Dolto en dériver des abstractions délirantes. On lira avec amusement des exemples (par exemple, quand un garçon tête sa mère, il accomplit le complexe d'Oedipe et le complexe de castration en s'imaginant avaler le lait de sa mère, puis tout l'intérieur de son corps dans lequel se trouve le pénis de son père !

Quant à Lacan, l'auteur en est à se demander, tellement les phrases et discours de Lacan sont incompréhensibles, si le maître ne tentait pas de voir jusqu'où il pouvait s'avancer dans le délire sans dégouter ses disciples ! 

Pour ma part, il me semble me souvenir que Lacan avait envoyé sa thèse à Heidegger, et que celui-ci aurait estimé "que le psychiatre aurait besoin d'un psychiatre"...

Conclusion et conseil de lecture : Ouvrage raffraichissant et, nonobstant le ton les références sérieuses de l'auteur,  jubilatoire ! À lire sans retenue par ceux qui sont persuadés de l'imposture de la psychanalyse, ceux qui doutent encore mais veulent en être confortés, ceux qui y croient encore mais qui entendent une petite musique d'incrédulité raisonner dans leur sub-in-conscient.

 

Le retour de l'hypothèse DIEU. Stephen Meyer.

Le retour de l'hypothèse DIEU

par Stephen Meyer. Trédaniel. 2023, traduit de l'anglo-américain, Harper et  Collins 2021.

Cet ouvrage développe l'idée de "the intelligent design", traduit "intelligemment" dans cet ouvrage  par conception intelligente, et non le décalque stupide dessin intelligent.

Cet énorme pavé, 622 pages, 920 g, peut rebuter par son volume et son écriture fine (dont 1/3 de notes encore plus fines !), mais il mérite un effort.

Stephen Meyer développe la théorie de la "conception intelligente", élaborée face à l'assaut nouveau des "new atheists", professeurs d'universitée principalement américaines, mais aussi anglaise, dont le célèbre Stephen Hawkin. (et suivis en France, à bien des octaves en dessous, par un Michel Onfray ou d'autres).

Il en déroule tous les arguements, sans exceptions, sans en oublier aucun, en les développant dans le détail, ce qui explique l'importance du livre... mais aussi, ce qui est plus rare, il démonte toutes les hypothèses des new atheists, qu'elles soient du domaine de la physique (multivers, cordes...) ou de la biologie.

Pour comprendre le texte, nul besoin d'être physicien soi-même, mais il faut cependant un certain niveau de culture en relativité générale, en physique des particules, en mécanique quantique... et en biologie.

En revanche, être professeur de philosophie, ou ayant une bonne formation en philosophie, est nécessaire... J'avoue ne pas être certain d'être descendu au fond des assertions. L'auteur est professeur de philosophie scientifique (succesivement Cambridge, Whithworth, Seattle) , donc un philosophe, et l'on sait que les mots n'ont pas le même sens pour ces professionnels que pour le commun des mortels ! (Essayez de comprendre Spinoza en donnant à la substance et l'espace le sens de matière et d'étendue... ou savoir ce qu'est un homme noumène et un homme phénomène chez Kant...). C'est le seul reproche que l'on peut faire à ses démonstrations... (et pourtant il prend la peine de bien expliquer et définir ce qu'il appelle matérialisme, déisme, théisme, panthéisme...mais il n'est pas sûr que "causalité nécessaire" soit bien compris).

Allant au maximum des ses démonstrations, il estime que même "l'évolutionisme théiste" (l'évolution telle que posée comme hypothèse de nos jours est réelle, mais conçue par une intelligence) ou le "théisme scientifique" (la physique actuelle peut expliquer l'évolution de l'Univers depuis le Big Bang par les lois exposées actuellement, mais n'excluent en rien un ëtre intelligent et conscient) ne peuvent rendre compte du monde tel que nous le connaissons aujourd'hui,  mais que le seul théisme pur le peut.  Il suppose un Être personnel, conscient, volontaire et intervenant personnellement et régulièrement dans l'évolution de la matière et de la vie. [Nota : ses arguments peuvent séduire, et pourtant je suis partisan de ces deux théories , théisme scientifique  et évolutionisme théiste].

Dans les détails, l'auteur "règle ses comptes" avec Stephen Hawkin -voir mon article sur le sujet- et la théories des cordes... et d'autres contradicteurs, il faut le dire assez discourtois.

Plus important, l'auteur semble orienter vers une nouvelle notion : Dieu ordonne l'information cosmologique, délivre l'information à l'ADN dans son développement, etc. On trouve souvent ce terme dans cet ouvrage.

Or rappellons-nous les frères Bogdanov : dans leurs ouvragezs de vulgarisation, ils exposaient qu'avant le Big Bang existait... l'information, idée reprise de certains physiciens.

Dieu, chassé des cieux par la Science, y revient-il sous le vocable d'information ?

CONSEIL DE LECTURE.

Si vous désirez tout savoir sur la théorie théologique, philosophique, scientifique, de la conception intelligente (intelligent design), ses arguents et les réfutations  des théories opposées, si vous êtes prêts à faire un effort certain, procurez-vous cet ouvrage !

Sinon, la lecture de l'ouvrage de Bonnassies et Bolloré, Dieu, la Science, les preuves, plus léger, plus compréhensible, plus convaincant, mais moins par son allègement même, vous conviendra. (j'en rend compte sur ce blog).

 

Critiques, chroniques littéraires 3 Le Saint-Suaire de Turin. -témoin de la passion de Jésus-Christ-. Jean-Christophe Petitfils. .- Freud et Lacan : des charlatans ? J. Van Rillaer.- Le retour de l'hypothèse DIEU. Stephen Meyer. Festival de Bayreuth. Jacques Peter.

Jacques Peter. La fabuleuse Épopée du Festival de Bayreuth. 1876 à 2023

Les Presses du Midi. JUIN 2024

Voici un volumineux ouvrage (450 pages), mais équivalent pour la saga Wagner de la somme théologique de Saint Thomas d'Acquin !

J'écris saga car le lecteur aura accès non seulement à la vie de Wagner, mais aussi à celle de tout son entourage, épouse -Cosima-, enfants, beaux-enfants, gestionnaires du Festspielhaus, mais aussi à la biographies de tous les chefs d'orchestres et chanteurs et cantatrices qui se sont succédés à Bayreuth, de 1876 à 2023 ! ( non seulement racontées mais aussi illustrées toutes de photo : les personnages revivent, non, vivent devant nos yeux et dans nos têtes).

On ne peut qu'être stupéfait de la somme (encore !) de travail que cet ouvrage a pu demander à son auteur, des heures de journées fériées sacrifiées, de nuits écourtées. 

L'amateur de Wagner pourra accéder à l'analyse des livrets -sachons que Wagner écrivait lui-même les livrets des ses oeuvres, il n'était pas qu'un compositeur mais un dramaturge, un poète et un metteur en scène, artiste complet en somme- de tous les opéras joués à Bayreuth (car Wagner a sélectionné les meilleurs et les plus aptes à être joué dans son Festspielhaus). Peter nous permet de nous repérer dans le déroulement de l'intrigue, souvent complexe et obscure, de la tétralogie entre autres.

Du côté musical, Peter nous introduit à la compréhension des leitmotve, si caractéristique de l'oeuvre, et ressent que parfois la mélodie préfigure le musique atonale et dodécaphonique.

Et en sus, l'auteur se mue -et se mute- en architecte et ingéneur du son en expliquant combien Wagner a voulu la construction de cet opéra -le Festspielhaus- sur ses plans, pour accueillir certaines de ses oeuvres, avec des hardiesses architecturales inédites (on ne voit pas de la salle la fosse d'orchestre ! les murs sont nus et dépourvus de loges et balcons; la lumière est tamisée, voire absente), rendant un son accessible qu'à Bayreuth !

Jacques Peter ne se limite pas à l'analyse de l'oeuvre, mais aussi, très rare dans une "biographie'', à la mise en rapport de la situation politique de l'époque, et aussi à celle, plus sombre, de celle qui suivit, surtout à cause des relations très étroites de certains des descendants de Richard Wagner avec des dignitaires nazis.

Après avoir fourni un tel travail, Peter semble glisser vers la tristesse en décrivant la lente dégénérescence de la qualité du festival depis quelques décennies. Bayreuth est devenu le lieu expérimental de mises en scène de plus en plus hors sol. Il le relève : de 1876 aux années 2000, aucune place ne restait vide dans la salle et il fallait parfois attendre 10 ans pour en avoir une. (8 000 places pour une saison, 80 000 demandes !) De nos jours, des fauteuils ne reçoivent pas de spectateurs... Dans les opéras  où la mise en scène est plus esthétique, on joue du Wagner à guichets fermés...

Les physiciens sont à la recherche de la "théorie du tout", unifiant la physique, Jacques Peter l'a trouvé en musicologie en nous offrant une telle étude sous tous les angles imaginables, biographique, historique, sociologique, musicologique, du festival de Bayreuth.

Conseil de lecture : indispensable pour tout professionnel de la musique, et tout amateur forcené de Wagner, et ceux qui veulent le devenir... 28 € : bien faible prix pour une telle somme de connaissances.

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