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Publié par René Mettey

Le 16 juin, j'écrivais :

«Pendant qu'un tribunal s'essaie à faire la part de la culpabilité d'un docteur Bonnemaison, le conseil d'état tente de savoir s'il faut, ou non, laisser mourir de faim, à la demande du docteur Kariger, le jeune Lambert, à Reims.

J'apprends que notre confrère Kouchner, toujours en peine de notoriété, a répondu favorablement aux avocats du "médecin euthanasieur" pour venir à Biarritz témoigner en faveur de l'accusé.

Kouchner, Kariger, Bonnemaison, ces médecins qui foullent aux pieds le serment d'Hippocrate, mes confrères ?  Que non. Je me refuse à faire partie de cette confrèrie-là.

Kouchner se rappelle-t-il ce qu'il avait déclaré dans une émission télévisée sur l'euthanasie ? "je ne veux pas utiliser ce terme, car dans euthanasie, il y a nazi". On peut rire, ou prendre en considération cette interprétation lacanienne, mais ce que veut faire le docteur Kariger rappelle furieusement ce que firent les nazis à douze déportés à Auchwitz : la mort lente par la faim, et où s'illustra le père Maximilien Kolbe, en revendiquant de prendre la place d'un père de famille condamné à cette torture.

Que l'on me comprenne bien : je ne suis pas contre toute forme d'aide à mourir (je suis lacanien moi aussi et évite ce mot), mais à celui qui le demande expressément, et si ce qu'il supporte lui paraît, justement, insupportable, physiquement ou moralement, et que l'on ne puisse en aucun cas supprimer ces souffrances.

J'ai quarante ans de pratiques pédiatriques, dont vingt de réanimateur. Je n'ai jamais donné la mort, fut-elle "bonne" [euthanasie : du grec eu- :bon, et -thanatos : mort]. Je n'ai jamais abrégé des souffrances. J'ai concouru à ce que ce passage se fasse sans douleurs et dans la sérénité, pour le sujet, pour ses parents.

Or Bonnemaison n'a jamais répondu à une demande de ces patients qu'il a "exécutés". Quand on a donné la mort une fois, que l'on a franchi cet interdit, on recommence. Chez un sujet fragile, cette toute-puissance (un bourreau disait "seul Dieu et moi le pouvons" [donner la mort]) devient un appel à recommencer, pour compenser une angoisse ou névrose sous-jacente. Une infirmière a agi de même il y a quelques années : elle "soulageait" des malades dont elle seule décidait du pronostic, sans que personne ne lui eut rien demandé, et surtout pas les malades et leurs proches ! Elle fut condamnée à une peine légère (huit ans de prison je crois me souvenir, dont elle dut effecter certainement trois). Cette mansuétude a peut-être été un appel aux actes de Bonnemaison ! Que le tribunal de Biarritz s'en souvienne !

Quant au "docteur" Kariger, s'il obtient que le conseil d'état l'autorise à donner lui-même la mort, qu'il ait au moins la compassion de ne pas laisser mourir de faim le jeune Lambert, sinon il fera partie de la confrérie du "docteur" Mengele !

Une petite injection, je ne dis pas de phénol comme ce que subit saint Maximilien Kolbe, mais d'anesthésique puissant, et il aura fait preuve de sa charité chrétienne, lui qui se prétend "catholique social".

Car le jeune Lambert est "dans un état de conscience minimale" d'après les experts, et non pas dans le coma. Il réagit, pleure faiblement, bouge un peu aux sollicitations. D'ailleurs, le médecin prétend  parfois qu'il est en coma végétatif, d'autre fois qu'il fait savoir son intention d'en finir. Il faudrait savoir ! Kariger dit ce qu'il l'arrange.  Maintenant son état se dégrade, paraît-il : voilà, il suffisait d'un peu de patience !

Quant à ceux qui prétendent que des malades comme le jeune Lambert nous "coûtent cher", que la suspension des "soins" (c.à.d. alimenter celui qui ne le peut seul, le faire boire...) est légitime, alors laissons mourir de faim et soif les prématurés, les nouveau-nés, les adultes atteints de parkinson sévère, les tétraplégiques ... "Quand les bornes sont franchies, il n'y a plus de limites", faisit déclarer Christophe au sapeur Camembert.

Si le tribunal de Biarritz et le conseil d'état donnent raison, même partiellement, aux docteurs Bonnemaison et Kariger, je conseillerais aux futurs malades d'éviter d'aller se faire admettre au CH de Biarritz et au CHU de Reims... Il y aura bien un médecin, ou une infirmière, qui trouveront que votre état est sérieusement compromis, que vous allez coûter trop cher, qu'ils se sont déjà levé trois fois pour des urgences dans la nuit... ou écouteront avec bienveillance vos enfants dirent que l'héritage leur permettrait de mieux se lancer dans la vie, ou votre femme désirant se remarier plus vite etc...

 

P.S. 1 : Un résumé de cette chronique a été présentée sur le forum de discussion du Figaro. Il a été refusé par les modérateurs... la frilosité du Figaro, "organe de l'intelligence française", comme il se qualifiait autrefois, fait peine à voir.

 

P.S. 2 : 20 juin 2014 : le rapporteur du conseil d'état* vient de confirmer requérir "la mise à mort" de Vincent Lambert (dixit Le Figaro). jJai honte d'être français, j'ai honte d'être médecin,  j'ai honte d'être chrétien (le "dr" Kariger est médecin et "catholique social").

*décision prise par un seul homme ! En assise, 12 sont nécessaires pour condamner ou pas, et il n'y a plus de peine de mort!        »

 

En ce triste 24 juin, j'apprends coup sur coup :

-que le tribunal de Biarritz a acquitté le dr Bonnemaison et n'a pas proposé de lui interdire l'exercice de la médecine;

-que le Conseil d'État a permis la fin des soins les plus élémentaires sur le Jeune Vincent Lambert.

 

Restons lacanien : nous en sommes bien arrivés à un État nazi...

 


 P.S. les parents Lambert, que l'on stigmatise dans la presse "catholiques intégristes", car c'est une tarre, ainsi que deux frères et sœurs, ont fait appel devant la cour européenne de justice. Quelques mois de répis. Finalement, Marine et Jean-Luc, c'est peut-être utile, l'Europe.

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F
<br /> Et pourquoi ne pas évoquer la Belgique où l'on parle d'euthanasie pour les mineurs et même pour les patients porteurs d'Alzheimer? Comment peut-on parler de demande expresse dans<br /> ces cas-là? La "mort digne" a bon dos! Ce ne sont que des dérives financières...<br />
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